La chronique d'Yveline Jaboin : Juin 2006 - Un contexte d'apprentissage tout au long de la carrière

Le renouvellement quantitatif actuel du corps enseignant offre une occasion inédite à la politique menée à l’égard des enseignants de le façonner et de tirer parti des profondes transformations dont il fait l’objet. Un rapport de l’OCDE publié en 2005 (1), fait le point sur ce sujet, à partir d’une vaste étude inspirée de l’expérience de 25 pays, dont la France. Tout d’abord, se souciant prioritairement de la qualité de l’enseignement et de l’apprentissage, ce rapport s’éloigne résolument des « solutions de fortune » souvent adoptées pour faire face à une pénurie d’enseignants, comme, par exemple, celles qui consistent à « affecter des enseignants à l’enseignement de matières pour lesquelles ils ne sont pas pleinement qualifiés » ou bien à « augmenter le nombre d’heures de cours allouées aux enseignants ».

Quelles que soient leurs singularités, le rapport suggère un certain nombre d’orientations communes aux divers pays considérés en mettant l’accent sur la nécessité de recruter des enseignants de qualité bénéficiant d’une formation adéquate s’inscrivant dans un continuum. Selon ce rapport, les différentes étapes de la formation professionnelle doivent être connectées plus étroitement. Il s’agit de mettre en place un contexte d’apprentissage tout au long de la vie centré sur le soutien des enseignants en début de carrière puis sur les incitations à la formation professionnelle continue et à l’utilisation de ses ressources en cours de carrière. L’amélioration des programmes d’initiation et la formation tout au long de la carrière sont préférées à l’allongement du dispositif de formation initiale. Il est envisagé «  un exposé des normes relatives aux compétences et à la performance des enseignants » pour chaque étape de la carrière afin d’assurer un cadre pour le continuum de la formation. Seule une information constante, dispensée en formation continue, paraît susceptible de maintenir la qualité de l’enseignement et permettre aux enseignants de poursuivre efficacement leur perfectionnement professionnel en étant étroitement impliqués dans l’analyse de leurs pratiques. À cet égard, les enseignants ne paraissent pas avoir autant évolué que d’autres professionnels qui « commencent leur vie active en ayant l’impression d’assumer un rôle qui a été façonné par les recherches antérieures et qui sera transformé au cours de leur parcours professionnel par les recherches à venir ». Dans certains pays cependant, les enseignants ont déjà endossé un rôle de chercheur en plus de leur rôle pédagogique, en centrant leur perfectionnement professionnel sur les indices d’amélioration de leur pratique. Le rapport souligne le rôle important des nouvelles communautés de pratiques (2) dans cet effort d’information et de formation. La politique à l’égard des enseignants préconisée par l’OCDE pourrait initier, si elle était mise en œuvre, une perspective professionnelle passionnante par la recherche systématique de pratiques innovantes efficaces au sein des classes.

(1)  Le rôle crucial des enseignants : attirer, développer et retenir des enseignants de qualité.
(2) La notion de communauté de pratiques est apparue au début des années 1990, à la suite de l’arrivée d’Internet et de nouveaux logiciels et outils technologiques. Elle désigne un groupe de professionnels, de taille variable, qui interagit, partage des connaissances, apprend et travaille ensemble, crée des pratiques communes, construit des relations, développe un sentiment d’appartenance et enrichit ses savoir-faire sur un domaine d'intérêt commun (expertise, compétences, processus…) qui est l'objet de leur engagement mutuel. (tecfa.unige.ch:8888/riat140/130).