La chronique d'Yveline Jaboin : Juin 2008 - La réforme de la formation initiale des enseignants

Le 27 mai 2008, le Président de la République a annoncé une réforme de la formation des enseignants. Au moins deux grandes transformations se dessinent pour la rentrée scolaire 2010 : la « mastérisation » des professeurs et la vraisemblable réduction du rôle des IUFM (Instituts Universitaires de Formation des Maîtres) – devenus écoles internes des universités - dans la formation des enseignants. La formation initiale des professeurs s’allonge, le recrutement se faisant désormais au niveau Master 2, soit à bac + 5. Néanmoins, l’élévation du niveau de recrutement des enseignants touchera beaucoup plus le primaire que le secondaire. En effet, les futurs professeurs des écoles sont moins souvent titulaires d’un diplôme supérieur à bac + 3 que leurs homologues des lycées et collèges. Par ailleurs, les concours de recrutement (de type CAPES, Agrégation et CRPE) sont maintenus. Une fois reçu au concours, chaque enseignant recevra une formation selon le principe du compagnonnage, la deuxième année d’IUFM, pendant laquelle les enseignants étaient stagiaires, disparaissant. Les professeurs en formation initiale n’étant plus rémunérés, les économies ainsi réalisées seront réinvesties pour partie dans une revalorisation des salaires des débutants.
Si le niveau de recrutement des futurs enseignants est désormais connu, la nature des épreuves des concours ne l’est pas. À l’heure actuelle, il n’est donc pas possible d’envisager le contenu des enseignements, l’organisation de la formation ainsi que les personnels qui les mettront en œuvre. Néanmoins, se pose la question récurrente de la place de la formation pédagogique dans la préparation au métier. S’oriente t-on vers une compétence professionnelle essentiellement définie à partir de sa composante disciplinaire ? Ou bien la compétence professionnelle sera t-elle d’abord définie à partir de sa dimension pédagogique ? Dans la majorité des pays européens*, les enseignements académiques disciplinaires et la formation pédagogique professionnelle sont dispensés en même temps, ce qui constitue le modèle simultané. En Europe, ce modèle semble gagner du terrain depuis une vingtaine d’années. Il tend à valoriser la formation pédagogique, notamment en ce qui concerne la formation des professeurs intervenant dans les écoles et les collèges. En revanche, dans la formation des professeurs des lycées, c’est le modèle consécutif qui est mis en œuvre. Dans ce modèle, la formation se fait essentiellement à l’université pendant 5 ans et la formation professionnelle occupe une place plus réduite.
En France, ce n’est qu’au début des années 1990, lorsque les IUFM ont été créés, qu’une épreuve à caractère professionnel a été introduite dans les concours de recrutement des PLC (Professeurs des Lycées et Collèges). Cependant, pour les PLC, la part de l’enseignement consacrée à la formation professionnelle est restée très faible. Si une volonté de réduire le rôle des IUFM dans la formation des professeurs se confirmait, la France se dirigerait alors vers un modèle consécutif de formation pour tous les enseignants quel que soit leur niveau d’intervention, à l’inverse de ce qui se fait dans la majeure partie des pays européens.

* Selon Nathalie Mons*, spécialiste des comparaisons internationales des politiques éducatives, et auteur, avec l’équipe d’Eurydice, d’un rapport pour la Commission Européenne sur les responsabilités, l’autonomie et la formation continue des enseignants dans les pays européens, qui sera rendu public prochainement (interview sur le site : www.lecafepedagogique.com).