La chronique d'Yveline Jaboin : La relance du dispositif « Seconde carrière »

Depuis la réforme des retraites de 2003, la carrière des enseignants du premier et du second degré a été allongée de plusieurs années. En contrepartie, ils peuvent, en théorie et dans la mesure où ils totalisent au moins 15 ans d’enseignement, changer de carrière, à l’image des militaires, des pilotes et des sportifs de haut niveau par exemple, pour qui cette situation est quasiment la norme. Depuis lors, la question de l’âge dans les métiers de l’enseignement se pose, certains voyant un handicap dans le décalage de génération entre les élèves et des enseignants exerçant leur métier depuis plus de 40 ans.

Quatre ans plus tard, relativement peu d’enseignants ont profité du dispositif « Seconde carrière » et trouvé un emploi dans un autre ministère ou dans la fonction publique territoriale. Pour dynamiser cette mesure, une mission « Seconde carrière » vient d’être créée. Constatant que les recruteurs potentiels ne voient pas toujours en quoi consistent les compétences des enseignants et comment elles peuvent répondre à leurs attentes et à leurs besoins, la mission propose d’élaborer un référentiel des compétences acquises au bout de 15 ans d'ancienneté dans l’enseignement.

Le dispositif « Seconde carrière » s’appliquant au niveau national, pour la procédure de choix, tous les rectorats doivent constituer un vivier de candidats à qui l’on proposera un travail d’accompagnement en amont (débouchant sur un bilan de compétences par exemple) et dont le dossier sera présenté devant une commission (BO n° 36 du 6 octobre 2005). Chaque année, quelques dizaines d’enseignants devraient ainsi pouvoir bénéficier du dispositif, la première promotion « Seconde Carrière » étant prévue à la rentrée 2007.

Michaël Huberman (1989) a dépeint une séquence « normative » dans le cycle de vie professionnelle des enseignants : « il y aurait ainsi des phases, des transitions, des ‘crises’, etc., traversant la carrière de l’enseignement et touchant de ce fait un grand nombre, parfois la majorité, de ses praticiens » (Huberman, 1989, p. 22). La première phase, l’entrée dans la profession, serait marquée par des tâtonnements pendant les trois premières années de la carrière. Elle déboucherait sur une phase de stabilisation entre la 4e et la 6e année professionnelle. Cette phase de stabilisation serait suivie d’embranchements multiples à la mi-carrière. Ainsi, entre 37 et 45 ans, un certain nombre d’enseignants vivraient une période de « remise en question » pendant laquelle ils tireraient un premier bilan de leur vie, notamment sur les plans professionnel et relationnel.

Le dispositif « Seconde carrière » semble donc tout particulièrement s’adresser à ces enseignants qui ont le sentiment, au bout de 15 à 20 ans d’enseignement d’avoir « fait le tour » de leur profession. Il permet de changer d’activité professionnelle - avant qu’il ne soit trop tard - et de finir une carrière par une phase de sérénité plutôt que d’amertume.

BO n°36 du 6 octobre 2005.
Décret : http://www.legifrance.gouv.fr/texteconsolide/SSHCX2.htm
Huberman, M. La vie des enseignants. Evolution et bilan d’une profession. Lausanne, Delachaux et Niestlé, 1989.