Dans le cadre de la mise en œuvre de la loi d’orientation d’avril 2005, est entré en vigueur, le 1er janvier 2006, le décret (n° 2005-1035 du 26-8-2005. JO du 27-8-2005) permettant à un chef d’établissement de désigner un enseignant pour remplacer un collègue absent pour une durée inférieure ou é […]

La chronique d'Yveline Jaboin : Avril 2006 - La reconversion professionnelle vers les métiers de l'enseignement

Publiée le 01 avril 2006 dans la catégorie Archives

Dans le cadre de la mise en œuvre de la loi d’orientation d’avril 2005, est entré en vigueur, le 1er janvier 2006, le décret (n° 2005-1035 du 26-8-2005. JO du 27-8-2005) permettant à un chef d’établissement de désigner un enseignant pour remplacer un collègue absent pour une durée inférieure ou égale à deux semaines. Cette nouvelle organisation pourrait bien « préparer », en quelque sorte, un changement professionnel plus profond qui toucherait la valence des enseignants.


Pour les remplacements, chaque chef d’établissement doit élaborer, en concertation avec les équipes pédagogiques, un protocole fixant les objectifs, les priorités, les principes et les modalités pratiques d’organisation. Ce protocole doit ensuite être présenté au conseil d’administration de l’établissement qui doit régulièrement être tenu au courant des conditions de sa mise en œuvre. Ce sont bien entendu les enseignants qualifiés et titulaires qui sont prioritairement recherchés pour effectuer ce type de remplacement mais, le chef d’établissement peut faire appel à des personnels chargés d’assurer des services complémentaires lorsque cela est nécessaire « afin d’assurer la continuité de l’enseignement ».

Depuis la rentrée scolaire 2005-2006, avant d’y être contraints par décret, les établissements ont progressivement mis en place des protocoles sur la base du volontariat, en échanges d’heures supplémentaires, sachant qu’un enseignant ne peut être tenu d’effectuer ni plus de cinq heures supplémentaires par semaine, ni plus de 60 heures supplémentaires par année scolaire. Le principe prédominant est le suivant : un professeur de français absent doit être remplacé soit par un autre professeur de français, soit par un enseignant d’une autre discipline, par exemple un de ses collègues d’anglais, qui dispense dans ce cas un cours d’anglais. Aujourd’hui, le ministère estime que trois établissements sur quatre ont signé un protocole d’accord pour réunir des volontaires et déclare préférer laisser aux autres collèges et lycées le temps de trouver un accord sur la base du volontariat plutôt que d’utiliser le décret.

Dans le sillage de cette mesure et toujours dans un souci d’efficacité pédagogique, le ministre de l’Education nationale a lancé dimanche 8 janvier 2006 l'idée de former les professeurs à enseigner deux matières, par exemple « le français avec l'histoire, peut-être des sciences avec les mathématiques » (Gilles de Robien, Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro).

À travers ces deux mesures, c’est la spécialisation des enseignants du secondaire qui paraît ne plus correspondre totalement aux préoccupations éducatives actuelles. En d’autres termes, le modèle de l’enseignement secondaire public français - avec une définition de la compétence professionnelle uniquement centrée sur les connaissances spécialisées dans une discipline telle qu’elle apparaît dans les épreuves du concours de recrutement - semble être reconsidéré. Dans le secondaire, l’articulation entre les composantes disciplinaire et pédagogique de la compétence professionnelle est depuis longtemps l’enjeu de conflits (Chapoulie, 1987)(1). En 1985, la mise en extinction du corps des Professeurs d’enseignement général de collège (PEGC) - professeurs bivalents, issus de l’ordre du primaire, dont la formation comportait une forte dimension pédagogique caractéristique de l’enseignement primaire et qui, depuis 1963, enseignaient dans les Collèges d’enseignement secondaire (CES) devenus Collèges en 1975 - avait signé la victoire du secondaire sur le primaire.

Une vingtaine d’années plus tard, le balancier semble aller dans l’autre sens. À l’instar de ce qui se fait dans de nombreux pays européens, la réhabilitation de la bivalence engendrerait vraisemblablement une meilleure prise en compte de la dimension pédagogique de la compétence professionnelle. Ce changement professionnel provoquerait bien évidemment des transformations dans la formation des enseignants, ce qui pourrait être proposé par le ministre dans le cadre d’une réforme des Instituts Universitaires de Formation des Maîtres (IUFM).

(1) Chapoulie, Jean-Michel. Les professeurs de l'enseignement secondaire : un métier de classe moyenne. Paris, Editions de la Maison des Sciences de l'Homme, 1987.

 

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