D’un côté, en 2024, 916000 demandeurs d’admission en première année d’un premier cycle de l’enseignement supérieur français, parmi lesquels 645000 élèves scolarisés en classe terminale d’un lycée français (y compris ceux des lycées français de l’étranger), 170000 étudiants redoublant leur première année d’études supérieures et demandeurs d’une réorientation (celles et ceux qui redoublent dans la même filière ne repassent pas par le portail Parcoursup), 66000 personnes souhaitant reprendre leurs études à ce niveau après une ou plusieurs années de vie active, et 35000 candidats scolarisés en classe terminale de l’enseignement secondaire à l’étranger, désireux de venir faire leurs études supérieures en France.

Parcoursup : mode de fonctionnement

Publiée le 02 novembre 2024 dans la catégorie Scolarité et orientations

Un article de Bruno MAGLIULO

D’un côté, en 2024,  916 000  demandeurs d’admission en première année d’un premier cycle de l’enseignement supérieur français, parmi lesquels 645 000 élèves scolarisés en classe terminale d’un lycée français (y compris ceux des lycées français de l’étranger), 170 000 étudiants redoublant leur première année d’études supérieures et demandeurs d’une réorientation (celles et ceux qui redoublent dans la même filière ne repassent pas par le portail Parcoursup), 66 000 personnes souhaitant reprendre leurs études à ce niveau après une ou plusieurs années de vie active, et 35 000 candidats scolarisés en classe terminale de l’enseignement secondaire à l’étranger, désireux de venir faire leurs études supérieures en France.
De l’autre côté : un peu plus de 23 000 formations supérieures de niveau premier cycle de toutes sortes, qui exigent que celles et ceux qui souhaitent s’y intégrer expriment leurs candidatures sur le portail Parcoursup.
Il convient d’ajouter plusieurs milliers de formations proposées par des établissements privés qui recrutent « hors Parcoursup », en France ou à l’étranger. Dans cet ensemble on distingue les formations sélectives (sections de techniciens supérieurs, instituts universitaires de technologie, filière supérieure comptable et financière, écoles préparant aux diplômes des métiers d’art, autres écoles spécialisées en deux ou trois ans, grandes écoles à recrutement niveau baccalauréat, classes préparatoires aux grandes écoles et autres premiers cycles préparatoires, bi licences universitaires … ), de celles qui sont non sélectives, c’est-à-dire libres d’accès pour tout bachelier ou porteur d’un diplôme équivalent (une majorité des licences universitaires dites « simples »).
Autre caractéristique distinctive : certaines de ces formations sont dites « courtes », en ce sens que leur vocation première est de préparer leurs étudiants à s’insérer sur le marché de l’emploi  en deux ou trois ans après le baccalauréat, alors que d’autres nécessitent pour cela cinq années d’études supérieures ou plus, et sont donc qualifiées de « longues ». On distingue en outre les formations supérieures immédiatement professionnelles (certaines sont « sous statut étudiant », d’autres se déroulent sous statut d’alternance), de celles qui commencent par un premier cycle totalement ou majoritairement fait d’enseignements généraux, avant de permettre de s’engager dans un deuxième cycle à vocation professionnelle.

1- Du système d’expression des candidatures directement auprès des formations convoitées, à la régulation des flux d’entrée dans l’enseignement supérieur par des procédures télématiques
Aussi longtemps que le nombre des candidatures s’avéra suffisamment modeste pour permettre une gestion locale des demandes d’admission, les candidatures purent s’exprimer directement auprès de chaque établissement d’enseignement supérieur demandé.
Ce fut le cas en France, comme dans la plupart des pays dits « développés », jusque vers le début des années 1980. Cependant, du fait de la très importante croissance de la population scolaire concernée (en France, le nombre global de bacheliers demandeurs d’admission en première année de l’enseignement supérieur, qui n’était que de 40 000 en 1950, passa progressivement à 300 000 en 1980, et à 64 5000 en 2024), cette façon de procéder s’avéra de plus en plus inadaptée.
Les progrès réalisés dans le domaine de l’informatique permirent de concevoir et mettre en œuvre des outils télématiques de gestion des flux d’entrée dans l’enseignement supérieur. C’est ainsi que naquit une première génération  d’outils informatiques telle la messagerie RAVEL (recensement automatisé des vœux d’orientation des élèves), plateforme télématique de régulation des flux d’entrée dans l’enseignement supérieur employée dans les trois académies d’Ile-de-France à la fin des années 1980. Elle fut suivie, à l’approche des années 1990,  d’autres plateformes visant le même objectif, mises en œuvre dans diverses académies : Bretasup pour l’académie de Rennes, Racine pour l’académie de Toulouse, Ocapi pour celle de Lille, etc.
Cependant, ces divers  systèmes automatisés présentaient l’inconvénient de ne permettre de gérer que les seuls flux d’entrée dans les formations supérieures de l’académie de résidence de chaque candidat ou d’un groupement d’académies comme en Ile-de-France avec RAVEL. Or, le nombre des bacheliers choisissant de s’inscrire dans un établissement d’enseignement supérieur situé en dehors de leur académie de résidence ne cessant de croître, on prit conscience de la nécessité de mettre en place un « guichet national unique ». C’est ainsi que naquit APB (admission post bac) au début des années 2000, suivi depuis 2018 par la plateforme Parcoursup, toujours en vigueur aujourd’hui.

2. Qu’est-ce que Parcoursup ?
Concrètement, il s’agit d’un algorithme, une procédure informatisée régie par un ensemble de règles à suivre  par étapes pour résoudre le problème posé par la nécessité de parvenir à affecter le plus efficacement possible les près de un million de personnes qui, chaque année, sont en quête d’une place en première année de l’une des 23 OOO formations  supérieures qui recrutent leurs élèves par ce portail.
Parcoursup a été conçu sur le modèle de l’ « algorithme des mariages stables de Gale et Shapey », noms de deux mathématiciens/économistes qui, partant du principe que chaque femme a des préférences sur les hommes, et chaque homme des préférences sur les femmes, ont conçu un algorithme qui maximise la probabilité que les unions ainsi réalisées soient suivies de  réussites, c’est-à-dire soient  stables dans la durée. Avec l’algorithme Parcoursup, il s’agit d’attribuer à chacun des près d’un million de candidat(e)s, autant de places en première année de l’enseignement supérieur français, avec la plus grande probabilité possible que chaque « union » ainsi faite soit suivie de réussite.
Officiellement, le fonctionnement de l’algorithme Parcoursup est défini par la loi ORE (loi « orientation et réussite des étudiants », N°2018-166 du 8 mars 2018), et par un arrêté en date du 19 juin 2018 qui, dans son article 1, stipule qu’ « il est créé au sein du Ministère chargé de l’enseignement supérieur un service à compétence nationale dénommé « Parcoursup ».
Ses fonctions sont multiples et doivent être remplies dans un ordre rigoureux : en amont, cela commence par la mise en œuvre d’une phase d’information, suivie du recueil des vœux exprimés par les candidats, et pour cela la constitution de dossiers qui doivent contenir un certain nombre de documents permettant de présenter, pour chaque formation demandée, le bilan scolaire et personnel de chaque candidat (les notes qui ressortent du contrôle continu et du baccalauréat, les appréciations et avis exprimés par les enseignants et le chef d’établissement, divers certificats et attestations complémentaires,  une lettre de motivation (dite « projet motivé ») …
Les dossiers de candidature sont ensuite envoyés à chaque établissement supérieur demandé qui les classent (y compris lorsque la formation concernée n’est pas sélective), et retournent leurs réponses aux intéressés via la plateforme Parcoursup, dans l’ordre d’appel du classement fixé. Lorsqu’ils reçoivent une ou plusieurs propositions d’admission, les candidats sont tenus de faire savoir s’ils valident une de ces propositions et laquelle, et ce dans un délai communiqué (attention : le non-respect de cette règle entraîne automatiquement la perte de la proposition).
Pour celles et ceux qui n’auraient reçu aucune proposition, Parcoursup se mue en outil d’accompagnement vers une proposition. Lorsqu’une proposition a été acceptée définitivement, Parcoursup s’efface, les formalités d’inscription administratives et pédagogiques se faisant au sein de l’établissement d’enseignement supérieur  concerné.

Le calendrier annuel de Parcoursup
Du début novembre à la mi-septembre, Parcoursup se présente sous forme d’une suite d’étapes (dans la langue Parcoursup on dit « phases ») qui, à quelques jours près, sont les mêmes chaque année.
Cela commence par une première phase dite d’information qui s’ouvre début novembre et va jusqu’au 17 janvier 2025.  A cette période de l’année scolaire, il est trop tôt pour exprimer ses vœux : les inscriptions proprement dites ne se feront qu’à partir du 17 janvier 2025. Cependant, cette phase n’est pas à négliger car elle permet aux intéressés d’accéder à un grand nombre d’informations actualisées concernant la marche à suivre sur Parcoursup, ainsi que sur chacune des plus de 23 000 formations qui recrutent via cette plateforme . En particulier, vous pourrez ouvrir pour chacune de ces formations la rubrique « attendus », dans laquelle sont présentés, avec plus ou moins de précision, les « prérequis », autrement dit, les compétences et connaissances scolaires et comportementales qui sont valorisées par chaque jury chargé d’examiner et comparer les divers dossiers de candidatures. Si l’établissement convoité ajoute des épreuves de sélection, vous en découvrirez tous les détails.
Bien entendu, il est  possible d’anticiper l’ouverture de cette phase et donc de ne pas attendre le début du mois de novembre pour commencer à s’informer et réfléchir aux divers choix d’orientation envisageables. C’est même très fortement recommandé ! Autre conseil : profitez des multiples journées portes ouvertes, salons de l’orientation, journées d’information organisées au sein de votre lycée ou ailleurs, des possibilités de discuter de ce problème avec un conseiller d’orientation et/ou un professeur principal ou toute autre personne en charge de l’orientation.
A compter du 17 janvier 2025 s’ouvrira la phase d’inscription qui ira jusqu’au 14 mars 2025. C’est la période durant laquelle devront être créés les dossiers d’inscription (pour les lycéens, cela se fera au sein de l’établissement). Pour cela, il conviendra que chaque candidat accède à son espace personnel, en contrôle le contenu avant envoi, et formule ses vœux et sous-vœux (voir la différence dans le point suivant de cet article). Attention : après le 14 mars 2025, il ne sera plus possible d’ajouter de nouveaux vœux ou sous-vœux.
A compter du 15 mars 2025, et jusqu’au 3 avril 2025, se déroulera une troisième phase qui est dite « de validation définitive du dossier ». Se déroulant principalement au sein de l’établissement scolaire fréquenté ou dans un rectorat ou une Direction départementale de l’Education Nationale…, elle permet de peaufiner la rédaction du « projet motivé » (équivalent d’une lettre de motivation) que chaque candidat doit inclure dans le dossier pour  chaque vœu.
C’est en outre le moment d’ajouter des informations pertinentes dans la rubrique « activités et centres d’intérêt » (expériences d’encadrement, engagement citoyen, expérience professionnelle, ouverture au monde …), dans le but de valoriser son profil. Il sera en outre possible de faire connaître sa préférence dans la liste des vœux exprimés. Les familles sont invitées à vérifier que rien ne manque à leurs dossiers et qu’il n’y a pas d’erreur dans les informations fournies par l’établissement. Enfin, s’il n’est pas possible d’ajouter de nouvelles candidatures durant cette phase, il est encore possible de renoncer à certaines d’entre elles. A la fin de cette phase, tous les dossiers seront envoyés à Parcoursup qui se chargera de les faire parvenir aux établissements d’enseignement supérieur concernés.
Du 4 avril 2025 au 30 mai 2025 se déroulera la phase de traitement des dossiers. A cet effet, chaque formation supérieure concernée doit constituer une « commission d’examen des vœux » (CEV) qui, selon des critères à géométrie variable (voir sur ce point le chapitre 6 de cet article), est chargée de classer l’ensemble des candidats, puis de leur faire parvenir les réponses attendues.
La phase de communication des réponses ira du 30 mai 2025 au 12 Juillet 2025. Attention : si les trois quarts des réponses parviennent aux intéressés dans la première semaine de cette phase, une plus longue attente pourrait être demandée à certains candidats. Sachez qu’en 2024, à la date du 15 juin, soit deux semaines après l’ouverture de cette phase, 85% des réponses étaient parvenues aux intéressés.  Attention : en cas de proposition d’admission ou de mise en liste d’attente, les candidat(e)s doivent obligatoirement faire part de leurs réponses dans un délai qui leur est indiqué, et au-delà duquel, en cas de non réponse, la proposition ainsi faite expire automatiquement.
Une phase d’admission complémentaire est proposée aux candidats qui n’auraient reçu aucune proposition durant la phase principale d’envoi des réponses, et ceux qui en auraient reçu au moins une, mais ont fait le choix d’y renoncer. Ils étaient environ 85 000 dans ce cas en 2024. En 2025, elle ouvrira le 11 juin  et s’étendra jusqu’au 12 septembre. Pour cela, dans chaque académie, il est procédé à un recensement des places restées disponibles après la distribution principale, à une mise en ligne de cette nouvelle offre, et tout candidat qui le souhaite peut demander son admission dans l’une ou plusieurs de ces formations à places vacantes.
En 2024, parmi les 85 000 candidats restés dans cette situation, la moitié seulement à usé de cette seconde chance, et obtenu une affectation pour la plupart d’entre eux. Les autres ont préféré renoncer à Parcoursup en s’inscrivant dans des formations supérieures hors Parcoursup, en optant pour une année de césure à l’étranger, pour une première insertion sur le marché du travail, voire pour un redoublement volontaire en classe terminale.

3- Combien de vœux est-il possible d’exprimer ?
Sur Parcoursup, un vœu c’est une candidature en vue d’accéder à une formation proposée par un établissement d’enseignement supérieur. Ainsi, par exemple, la demande d’être admis en filière BUT (Bachelor universitaire de technologie) de techniques de commercialisation de l’IUT de Tours, correspond à un vœu. Cependant, conscients de l’importante sélection qui règne à l’entrée de cette formation, la plupart des candidats ne se contentent pas de faire un seul vœu : ils utilisent leur droit d’ajouter des candidatures concernant la même formation, mais dans d’autres établissements. Dans notre exemple, le candidat peut élargir sa candidature en sollicitant, en plus de l’IUT de Tours, son admission à la même formation, aux  IUT d’Angers et Nantes. Dans ce cas il aura exprimé un vœu et trois sous-vœux (pour ces derniers, on dit parfois « vœux multiples »).
Tout candidat peut exprimer jusqu’à dix vœux et dix sous-vœux, soit un total maximum de vingt, pour ce qui est des formations sous statut scolaire. Il est possible d’éventuellement ajouter des demandes d’admission dans des formations par l’apprentissage (ou de se contenter de ces dernières), et ce à raison des mêmes maximum : dix vœux et dix sous-vœux.
Notons qu’une stratégie de multiplication des vœux et sous-vœux est sans risque, car si en retour de ses diverses candidatures un(e) candida(e) reçoit plusieurs réponses positives, il(elle) pourra choisir celle qui lui convient le plus.
Faut-il hiérarchiser ses  vœux ? Cela n’a rien d’obligatoire, mais c’est possible, et même recommandé. Pourquoi cela ?
On avait beaucoup reproché à l’ancienne plateforme APB (admission post-bac) d’obliger les candidats à hiérarchiser les vœux exprimés, en indiquant à l’avance celui qui est le plus désiré, puis le second, et ainsi de suite. C’était alors le vœu le mieux classé qui débouchait sur une réponse « oui » qui faisait l’objet d’une proposition d’admission. Avantage : cela permettait de répondre très rapidement et donc de raccourcir les délais de réponses. Cependant, cela obligeait chaque candidat à être en mesure d’exprimer des choix définitifs avant la fin de l’étape de préparation et envoi des dossiers de candidatures, fixée vers le début mars, ce qui était trop tôt pour certains.
Dans le but de donner plus de temps de réflexion avant d’exprimer les vœux définitifs, il fut décidé que la nouvelle plateforme Parcoursup,  mise en œuvre en 2018, n’exigerait plus des candidats qu’ils hiérarchisent leurs vœux avant la phase d’envoi des dossiers. Très vite cependant, on prit conscience que cela revenait, pour un trop grand nombre d‘entre eux, à repousser la date à laquelle ils recevaient une proposition d’admission, et donc à imposer à certains de trop longs délais. C’est ainsi qu’en 2024, ils furent 85 000 (plus de 10 % de l’ensemble) à ne pas encore avoir reçu de proposition d’admission à la fin de la première phase d’admission !
Saisi de cette question, le Comité éthique et scientifique de Parcoursup (CESP) recommanda que les candidats qui le souhaitent puissent faire connaître le vœu le plus espéré deux semaines après le début de la phase des réponses des établissements d’enseignement supérieur, ce qui fut mis en application et permit de raccourcir les temps d’attente pour la plupart. Depuis, chaque année, le Ministère fait remonter la date à laquelle les candidats peuvent faire connaître leur préférence. Ce fut le 18 juillet en 2022, le 3 juillet en 2023, et le 10 juin en 2024.  A la date de rédaction de cet article, la date relative à 2025 n’a pas encore été communiquée. Elle se situera probablement dans la première quinzaine de juin (à vérifier lors de l’ouverture de la phase d’information au début du mois de novembre 2025).
Enfin, il est relativement fréquent qu’au moment où les familles reçoivent leurs réponses, nombre d’entre elles reçoivent plusieurs propositions d’affectation, et doivent alors en choisir une et une seule. Il est dans ce cas nécessaire de s’être fixé une hiérarchie de ses vœux afin de résoudre aisément ce problème.

4- Les réponses que les candidat(e)s peuvent recevoir
Chaque vœu exprimé par un(e) candidat(e) fait l’objet d’une réponse de la part de la commission d’examen des vœux (CEV) de chacune des formations demandées. Sur Parcoursup, ces réponses peuvent être les quatre suivantes :
« Oui » : Cette réponse correspond à une proposition d’admission
« Oui si » : Cette réponse ne peut être exprimée que pour l’admission dans une formation supérieure non sélective. Il s‘agit le plus souvent d’un premier cycle universitaire de type licence simple (par exemple : la licence de mathématiques de l’université du Havre). Concrètement, une telle réponse signifie que la formation supérieure concernée répond ainsi parce qu’elle n’a pas le droit de répondre « non » (puisqu’elle est officiellement « non sélective »), et ce malgré le fait que le dossier de candidature d’un tel candidat révèle un profil inadapté par rapport aux « attendus » (les prérequis qui sont présentées comme étant des conditions de la réussite). Un tel candidat aurait probablement reçu un « non » si la formation avait été sélective. L’un des buts visés par l’envoi d’une telle réponse est de faire prendre conscience à ces candidats que celles et ceux qui la reçoivent courent un très gros risque d’échec. Cette réponse « oui si » vise donc, lorsque c’est possible, à  inciter les candidats concernés  à renoncer à une telle orientation, au profit d’une autre qui leur correspond mieux. Cependant, un tel candidat peut passer outre cette grosse réserve et, malgré l’avertissement, valider cette proposition d’admission. Il est en droit de faire ce choix. Mais dans ce cas, il s’engage à suivre au sein de son université un « parcours adapté » venant s’ajouter aux enseignements dont bénéficient tous les étudiants.
Le programme d’accompagnement personnalisé imposé aux étudiants « oui si » est à géométrie très variable, et d’une efficacité limitée
Le parcours complémentaire de soutien  imposé aux étudiants admis en université après une réponse « oui si » a le mérite d’exister, et de s’accompagner pour certains de meilleures chances de réussite.  Ces dispositifs d’accompagnement sont à géométrie très variable : modules de soutien dans diverses matières, tutorat, étalement du parcours de la première année sur deux ans, accès réservé à un laboratoire de langues, séminaire de pré-rentrée pour remise à niveau, etc.
Chaque formation concernée est libre de définir et mettre en œuvre le parcours de soutien qui lui parait le plus adapté aux besoins de ses étudiants « oui si ».  Or, du fait du manque de moyens que connaissent presque toutes les universités, dans un trop grand nombre de cas, ce qui est proposé est insuffisant pour permettre d’aboutir à une baisse significative des taux d’échec de cette catégorie d’étudiants. Il n’empêche : pour tous les étudiants « oui si », le programme complémentaire de soutien est obligatoire.
D’après les statistiques du Ministère chargé de l’enseignement supérieur, durant l’année universitaire 2023/2024, 1300 licences et PASS (parcours spécifique accès santé) mirent en œuvre un tel dispositif de soutien dont bénéficièrent 27500 étudiants. Leur effet ne fut bénéfique que pour trop petit nombre de ces étudiants fragiles : 87% des étudiants de première année de licence y ayant été admis après une réponse « oui si », ne parvinrent pas à passer en deuxième année, alors que globalement, ce ne fut en moyenne le cas que de 45% de celles et ceux qui avaient reçu une  réponse « oui ».
« En attente » : L’admission est pour le moment refusée, mais pourrait se transformer ultérieurement en « oui » si un nombre suffisant de candidats ayant reçu une réponse « oui » se désistent, permettant au curseur de remonter jusqu’à un(e) candidat(e) placé(e) en liste d’attente. Prenons l’exemple d’un élève qui a demandé son admission dans la CPGE (classe préparatoire aux grandes écoles) B/L d’un lycée qui offre 28 places, et lui répond « en attente » en ajoutant que son classement sur la liste d’attente est le cinquième. Parmi les 28 admis (auxquels il a été répondu « oui »), certains se désistent au motif qu’ils ont reçu une ou plusieurs autres réponses « oui » de la part de formations ayant leur préférence. Si ces derniers ne sont que trois, le curseur ne remontera pas assez dans la liste d’attente pour permettre à l’élève pré citée de voir la réponse se transformer en « oui ». Par contre, si le nombre des désistements est cinq ou plus, alors ce candidat verra la réponse « en attente » se transformer en « oui », à la condition bien sûr qu’il ait répondu préalablement qu’il acceptait cette proposition de mise en attente. On comprend pourquoi nombreux sont ceux qui considèrent que la gestion des listes d’attente et sans doute un des problèmes les plus complexes que pose Parcoursup.
« Non » : C’est dans ce cas une réponse définitive et sans appel. Seules les formations sélectives sont en mesure de communiquer une telle réponse.
Comme chacun peut s’en douter, puisque les candidats reçoivent autant de réponses qu’ils ont exprimés de vœux, il est fréquent qu’ils aient ensuite à trancher entre plusieurs « oui » et/ou « en attente ». Pour bien comprendre ce qui se joue, nous vous proposons un cas de figure réel qui s’est produit en 2024 : celui d‘un  élève de terminale générale qui a exprimé 14 vœux, et a reçu les 14 réponses suivantes : six « OUI », cinq « en attente » et trois « non ». Il lui a fallu d’abord choisir lequel des six « oui » il validait et donc renoncer aux cinq autres. C’est logique car n’étant pas certain d’avoir mieux avec les formations l’ayant placé en liste d’attente, cela lui permet d’avoir la garantie d’obtenir satisfaction sur une orientation qu’il a  demandée et qui est la plus attractive à ses yeux parmi les six lui ayant répondu « OUI ».
Cependant, il bénéficie en outre de cinq réponses « en attente ». Logiquement, il doit se poser la question suivante : est-ce que, parmi ces cinq formations m’ayant classé en liste d’attente, il en existe une ou plusieurs  qui, dans la hiérarchie de mes vœux, comptent plus  pour moi que celle que j’ai validé parmi les six « oui » ? Si la réponse est non, alors je n’ai rien à gagner à valider une ou des réponses « en attente » puisque même si l’une d’entre elles se mue en « oui », je lui préfèrerai la formation validée parmi les six « oui ».
Par contre, si une de ces réponses « en attente » correspond à une formation qui m’attire plus fortement, alors j’ai intérêt à valider la ou les propositions ainsi faites, et patienter dans l’espoir de voir l’une d’entre elles se transformer ultérieurement en « oui ». C’est ce que cet élève a décidé de faire, et sa patience a été couronnée de succès puisqu’il a fini par obtenir une réponse « OUI » au terme d’une attente de deux semaines, pour une formation qui était la plus espérée à ses yeux. Ajoutons qu’une telle stratégie est sans risque puisque si les formations ayant d’abord répondu « en attente » ne font aucune proposition « oui », ce candidat continue de bénéficier du droit de valider définitivement le premier « oui », qui lui est acquis tout au long de la procédure.

5- Parcoursup amplifie-t-il la sélection ?
On reproche souvent à Parcoursup d’avoir amplifié la sélection à l’entrée de l’enseignement supérieur, faisant courir le risque de réduire, voire de supprimer dans un futur plus ou moins proche, le droit dont dispose en France tout bachelier (ou porteur d’un diplôme équivalent) d’avoir accès à une place dans l’enseignement supérieur (pas forcément pour la formation qui serait sa préférée).
Rappelons que la sélection à l’entrée de l’enseignement supérieur est, en France comme dans la plupart des pays du Monde, très antérieure à la création de Parcoursup, comme de ses homologues à l’étranger : en France, en 1960, 45% de l’offre de places en première année de l’enseignement supérieur était sélective. On aurait pu choisir de garder ce quasi équilibre entre le poids des formations référencées sur Parcoursup, et celles qui ne le sont pas. Force est de constater qu’on ne l’a pas voulu puisque cette plateforme télématique oblige toutes les formations, y compris celles qui sont officiellement non sélectives, à classer l’ensemble de leurs candidats, ce qui revient à réduire le « libre accès de tout bachelier à une formation universitaire non sélective » de son choix.
Sans aller jusqu’à permettre d’affirmer que la généralisation des pratiques de sélection à l’entrée des études supérieures est pour demain, il est évident que l’on s’est engagé sur un chemin qui se caractérise par une extension du principe de « régulation des flux d’entrée » en première année de l’enseignement supérieur », ce qui est une façon de dire qu’il y a bien extension de la sélection à ce niveau d’études. Dans quelle mesure Parcoursup en est-il responsable ?
Pour répondre objectivement à cette question, nous commencerons par rappeler que c’est la « loi ORE », pré citée dans le premier chapitre de cet article, qui a introduit le principe du classement des candidat(e)s à l’entrée dans l’enseignement supérieur non sélectif.
A cet égard, le portail Parcoursup n’est qu’un instrument d’application de ce qui a été décidé dans le cadre de la loi ORE. En outre, le classement des candidats était déjà chose acquise pour les formations supérieures officiellement sélectives (voir leur liste en introduction de cet article), et n’est une nouveauté que pour les formations universitaires non sélectives de premier cycle, notamment les licences dites « simples » et les premiers cycles universitaires de santé (PASS, LASS).
En fait, en 2024, cette nouveauté n’a concerné que 15% des places offertes sur Parcoursup : celles qui sont « à effectifs tendus » ou, pour le dire autrement, les premiers cycles universitaires dont les capacités d’accueil ne permettent pas de s’ouvrir à tous les candidat(e)s. Fréquemment, il s’agit de celles de droit, STAPS, psychologie, santé ….

6- Contrairement à ce que croient beaucoup de personnes, les dossiers de candidatures ne sont jamais classés uniquement  par une machine
Comme le fait remarquer Catherine Moisan, membre du Comité Ethique de Parcoursup, dans un article paru dans le journal La Croix du 11 novembre 2022 (« Parcoursup : enquête sur les algorithmes qui décident de l’avenir de nos enfants »), « Parcoursup est un algorithme qui guide le traitement des informations  fournies aux commissions d’examen des vœux ». Il participe donc indéniablement à l’élaboration  des classements des candidats, mais ne le fait pas à lui tout seul. En outre, son importance est variable selon le type de formation considérée.
Commençons par rappeler que règlementairement, durant la phase d’examen des dossiers de candidatures et d’élaboration des classements des candidats, Parcoursup n’est officiellement qu’un « outil d’aide à la décision » (OAD).
De quelle décision parlons-nous ? Il s’agit de celle qui conduit chaque « commission d’examen des vœux » (CEV) à classer l’ensemble des candidats, en se fondant sur des critères/paramètres/modalités d’épreuves de sélection… qui sont propres à chaque formation, et doivent être communiqués à l’avance sur la plateforme, afin d’éviter l’accusation d’avoir manqué de transparence. Dans une note intitulée « L’examen des vœux avec l’outil d’aide à la décision », accessible sur le site services.dgesip.fr, la Direction générale de l’enseignement supérieur rappelle que « la détermination du classement pédagogique des candidats doit être principalement le fruit d’un travail d’analyse collectif et humain organisé dans le cadre d’une commission d’examen des vœux  propre à chaque formation ». Cela signifie que l’ « outil d’aide à la décision » (Parcoursup) est une composante importante, mais secondaire, du dispositif mis localement en place pour classer les candidats : le principal devrait être dans le travail des CEV.
Cependant, il convient de tenir compte du fait que nombre de formations ne disposent pas des ressources nécessaires pour traiter très «humainement» le trop grand nombre de dossiers qu’elles reçoivent. Comment pourrait-on appliquer les mêmes règles à une section de technicien supérieur (préparatoire à un BTS) qui reçoit 11O demandes d’admission et offre 30 places, et à une licence universitaire de droit qui reçoit plus de 5000 dossiers de candidatures pour 600 places à pourvoir ? Chacun peut comprendre que la tendance à recourir à l’OAD sera beaucoup plus grande dans le deuxième cas.
Or, cette volonté de donner la priorité à une analyse des dossiers de candidatures par des humains se heurte au fait que l’algorithme Parcoursup, dans sa dimension OAD, fonctionne sur un principe très jacobin, typique du système administratif français : celui de la conviction  largement répandue qu’il existe une équivalence des pratiques de notation, appréciations qualitatives …, d’un lycée à un autre, sur tout le territoire, voire au-delà de nos frontières. Or, de plus en plus, on prend conscience que l’« effet établissement » règne fortement. Comme le dit justement un haut responsable de l’évaluation des élèves au Ministère de l’Education nationale, désireux de garder son anonymat : « Aujourd’hui les pratiques d’évaluation sont largement des "pratiques maisons", propres à chaque établissement. L’ "effet établissement" l’emporte de plus en plus sur l’ "effet élève", ce que Parcoursup ne prend pas suffisamment en compte, d’autant qu’il est juridiquement interdit de paramétrer l’algorithme en fonction de la réputation du lycée d’origine de chaque candidat(e). Dès lors, la tentation est forte, notamment dans le cas de formations supérieures sélectives, de se passer en grande partie de l’OAD, pour lui préférer la mise en œuvre de critères de classement propres à l’établissement d’enseignement supérieur recruteur ».
Ainsi, non seulement les formations supérieures ont tendance à recourir de plus en plus à un traitement mécanique des dossiers de candidatures, mais lorsqu’elles se fondent sur l’algorithme national, elles sont de plus en plus nombreuses à ajouter des paramètres locaux complémentaires. Autre pratique qui se multiplie : celle qui consiste à recourir à l’OAD dans un premier temps, afin d’éliminer en première étape une partie des candidat(e)s, puis d’examiner plus « humainement » les dossiers restant.
Reste l’application de règles restrictives incontournables que sont les quotas de places réservées,  tels que fixés impérativement par la puissance publique : candidats boursiers de l’État,  bacheliers professionnels demandeurs d’une admission en filière BTS, bacheliers technologiques en IUT, part des places réservées en filière universitaire non sélective à des candidat(e)s hors secteur géographique de recrutement.
Ces quotas de places réservées sont fixés chaque année par le Recteur de chaque académie, et communiqués à l’avance à chaque jury (CEV) qui doit en tenir compte.  Si le classement proposé n’est pas conforme à la bonne application de ces quotas, l’algorithme Parcoursup fait remonter dans le classement certains candidats pouvant bénéficier de ces quotas, et ce avant envoi des réponses finales.

Conclusion
Force est donc de constater qu’il y a inégalité algorithmique des notes, appréciations et avis inclus dans les dossiers de candidatures Parcoursup, et que cela induit de plus en plus certaines familles à développer des stratégies d’évitement de certains établissements jugés trop sélectifs et donc pénalisants pour le passage dans l’enseignement supérieur.
Cela interfère en outre sur la façon dont les équipes de direction encadrent les pratiques d’évaluation des élèves dans leurs établissements respectifs. C’est ainsi qu’on voit de plus en plus de parents qui exercent une plus ou moins grande pression sur les professeurs pour qu’ils ne se montrent moins exigeants au regard des conditions d’accès de leur(s) enfant(s) dans l’enseignement supérieur, voire qui retirent leurs enfants de lycées dits d’excellence, mais où règnent des modes d’évaluation des élèves considérés comme étant trop sévères, pour les inscrire dans des établissements moins réputés, mais où il est plus facile de faire partie des meilleurs.
Pour réduire de tels risques, dans les dossiers Parcoursup on ne se contente pas d’indiquer les notes obtenues dans chaque matière : on y ajoute le rang de l’élève dans sa classe, et ce pour chaque matière, donnant l’impression justifiée que les jurys (les CEV) tiennent compte de ces critères de positions de l’élève dans sa classe.
C’est ce que nous déclare Michel, sous couvert de son anonymat, professeur de droit civil à  l’Université de Lyon, membre de la CEV de la licence de droit de son université  : « Nous ne recrutons que des élèves qui, dans leurs classes de première et terminale, ont régulièrement fait partie du premier quart de leur classe en anglais, histoire/géographie/géopolitique, sciences économiques et sociales, français et philosophie. Ce qui veut dire que nous ne recrutons que des bacheliers généraux et tenons en outre compte des enseignements de spécialité choisis par les candidats, en classes de première et terminale et des résultats qu’ils y obtiennent.»
L’évaluation des élèves est une chose très importante, ne serait-ce que parce qu’elle prétend dire ce que « vaut » chaque candidat à l’admission dans une formation supérieure, et permet des comparaisons, et de classer l’ensemble du meilleur au moins bon. Raison de plus pour ne pas se laisser aller à la facilité d’en confier trop grandement la charge à des outils informatiques froids.

 Bruno MAGLIULO - Inspecteur d’académie honoraire - Conférencier/Formateur/Auteur
Auteur, dans la collection L’ETUDIANT (diffusion par les éditions de l’Opportun) de :
SOS Parcoursup
Parcoursup : je gère
Parcoursup : 50 questions à vous poser avant de choir votre orientation
Quelles études sont vraiment faites pour vous ?
Quelles études, pour quel(s) métier(s)?

Et, aux éditions Fabert : Les grandes écoles : une fabrique des meilleurs
A paraître, aux éditions Fabert, en février 2025 : Les classes préparatoires et autres voies d’accès aux grandes écoles

 

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